Article de la revue MET MAR, Météorologie Marine, Météo-France, mars 2001

Reproduit avec l'autorisation du Directeur de la Publication.


 

Nicolas Metzl
LPCM/IPSL
Université Pierre et Marie Curie
Case 134, 4 place Jussieu
75252 Paris Cedex 05
Tél: 01 44 27 33 94
fax: 01 44 27 49 93
email: metzl@ccr.jussieu.fr

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Le climat de notre planète est un système éminemment complexe, faisant intervenir pratiquement tous les éléments de la nature. Pour mettre un peu d’ordre, les chercheurs ont pris pour habitude de définir quatre "compartiments" : l’atmosphère, l’océan, la biosphère, comprenant le règne végétal et le règne animal, et la cryosphère, englobant glaces de mer et glaces terrestres. Décrire la mosaïque des climats passés et présent et prévoir ses variations à court terme et à long terme  est une recherche qui nécessite de s'intéresser aux sous-systèmes fluides (eau, air, glace), à ce qu'ils contiennent (espèces chimiques et vivantes) et à leurs interactions énergétiques, dynamiques, chimiques, biologiques. Il faut donc progresser sur la compréhension des mécanismes à l'intérieur même des enveloppes : transports inter hémisphériques par les courants marins de chaleur, de sel, de carbone ; formation d'eau profonde et de fond aux hautes latitudes ; albédo des glaces marines et continentales ; activité biologique des organismes vivants, terrestres et marins, qui régulent les cycles biogéochimiques ; etc. Ils faut également parfaitement maîtriser les couplages entre les compartiments : échanges de chaleur, échanges de gaz tels que le gaz carbonique et le méthane, le cycle de l’eau qui est à l’origine des nuages, des précipitations, des glaces terrestres…

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Du climat passé à "l'anthropocène"

Mais, au sein de ces compartiments " naturels ", qui depuis la nuit des temps alternent stabilité et instabilité du climat, périodes glaciaires et interglaciaires, un élément perturbateur est apparu,  capable de dérégler la machine climatique : l’homme. Car, force est de constater que nous entrons depuis un siècle dans une ère nouvelle, " l'anthropocène ", une dénomination récemment proposée par le prix Nobel, Paul Crutzen (chimiste atmosphéricien néerlandais), qui traduit bien que l'homme est au centre du débat.

Le Marion Dufresne navire mixte (IFRTP,TAAF) à bord duquel sont effectuées les campagnes Oiso. Ici dans la baie du Morbihan à Kerguelen
 


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1- Variations de la température et de la concentration de CO2 dans l’air, mesurées dans les glaces antarctiques (site Vostok, données de Barnola et al., 1999). Les deux paramètres augmentent et diminuent de concert. La communauté scientifique s'attache à identifier les causes de ces co-évolutions. Le changement d'efficacité de l'absorption de CO2 par l'océan – qui dépend de la circulation océanique et de l'activité biologique marine – est une hypothèse retenue pour expliquer les variations de CO2 atmosphérique.

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Cette concentration a donc augmenté d'environ 30 % en un siècle. La perspec- tive d'un doublement de CO2 atmosphérique dans le courant du siècle prochain est bien réelle. Depuis cent ans, l'augmentation de CO2 apparaît, on ne peut moins dire, anormale : comment la planète va-t-elle réagir à une transformation de la chimie atmosphé- rique cent à mille fois plus rapide que celles observées par le passé, notamment lorsqu’il s’agit de gaz à effet de serre comme le CO2 et le méthane ?

Rôle de l’océan

Pour tenter de répondre à cette question, une bonne connaissance du cycle du carbone à l’échelle planétaire est indispensable. En particulier, il s'agit non seulement d'apprécier, avec plus de précision, ce que devient le carbone émis par l'homme – le carbone anthropique –, mais aussi de prévoir l'évolution des sources et des puits de carbone.

Le climat est très certainement perturbé par la consommation galopante d'énergie accompagnant l'accroissement démo- graphique. L'homme responsable doit y répondre par les décisions politiques et socio-économiques qui s’imposent, décisions qu'il faudra encourager malgré les incertitudes actuelles de nos connais- sances de la machine climatique. Quand et comment réglementer pour ne pas dérégler ? La réponse passe nécessairement par la mise en place de moyens technologiques et humains pour progresser sur les connaissances du milieu naturel.
Or, parmi tous les éléments que les scientifiques doivent mesurer et surveiller, le gaz carbonique (CO2) occupe une place primordiale.
En effet, les carottages dans les glaces antarctiques ont révélé qu’au cours des quatre derniers cycles

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Ces observations, effectuées par des équipes françaises, indiquent que dans le passé, les concentrations de CO2 ont varié entre 180 et 300 ppm (partie par million), tandis que la température évoluait de près de 10 °C : température basse correspondant à un faible taux de gaz carbonique, température élevée pour un taux élevé. Or, depuis le début de l'ère industrielle, en raison notamment de l'utilisation des combustibles fossiles, la concentration de gaz carbonique dans l'atmosphère n'a cessé d'augmenter. Elle était de 280 ppm il y a cent ans, de 316 ppm en 1958 lorsque des mesures systématiques ont été entreprises par l'Américain Charles Keeling sur le site de Mauna Loa à Hawaii et, en août 2000, lors de notre dernière campagne Oiso dans l'océan Indien sud, la concentration de CO2 dans l'air atteignait 370 ppm.

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 Actuellement, sur les 6 gigatonnes de carbone émis chaque année dans l'atmosphère, soit près d'une tonne de carbone par habitant, on estime qu'environ la moitié, 3 GtC/an, reste dans l'atmosphère. L'océan absorberait environ 2 GtC/an, une estimation principalement basé sur les modèles numériques. Il reste donc 1 GtC/an qui serait absorbé par la biosphère terrestre. Mais ce bilan ne prend pas en compte les estimations d'émissions dues à la déforestation, qui pourraient être de l'ordre de 1,5 GtC/an. Le bilan global de carbone n'est donc pas bouclé. Même pour les années 80-90, la répartition des puits de CO2 à la surface de la Terre est encore très mal connue, puisqu'une incertitude de 50 à 100 % affecte ces estimations. Quant à savoir comment évoluera cette répartition dans le futur, c’est une autre étape.

glaciaire-interglaciaire (400 000 ans), la courbe représentant les variations des concentrations de gaz carbonique épouse celle de la température de l’air.

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2 - Trajet et stations (triangles) des campagnes Oiso dans l'océan Indien sud.

 
Le Marion Dufresne dans une baie des Iles Crozet

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Mise à l'eau de la rosette (station 57°S en août 2000).

 


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Si l'on ne peut pas prédire avec précisions quel sera le climat de demain, celui qui conditionnera la vie de nos enfants et petits enfants, en revanche, on peut être sûr que de nombreux efforts de recherche devront être accomplis, notamment en ce qui concerne le rôle de l’océan.

Du fait de son volume et de la solubilité élevée du gaz carbonique dans l’eau, l’océan a une forte capacité à absorber le CO2. L’océan contient environ 65 fois plus de carbone que l'atmosphère. D'autre part, les temps caractéristiques des variations de la circulation océanique vont de la dizaine à quelques centaines d'années; cette échelle de temps est fondamentale pour comprendre les variations du climat planétaire. Connaître l'efficacité qu'a eu, a et aura l'océan à absorber le CO2 atmosphérique est au centre des préoccupations du programme OISO décrit ci-après.

Le Marion Dufresne,
un support irremplaçable pour les observations océaniques

L’étude des processus responsables des variations du cycle du gaz carbonique nécessite un suivi pluriannuel et pluridécennal en des lieux fixes. S’agissant de l’atmosphère, une soixantaine de sites répartis de par le monde mesurent en permanence sa composition chimique. En ce qui concerne l’océan, des stations fixes de mesure ont été mises en place dès les années 80 par les scientifiques américains, en zone subtropicale nord de l'Atlantique et du Pacifique (stations BATS aux Bermudes et HOT près d'Hawaii). Depuis 1998, le programme OISO (Océan Indien Service d'Observations) vient compléter le dispositif dans le sud de l’océan Indien. Toute une série de campagnes océanographiques sont planifiées pour quantifier les variations des sources et des puits de CO2 océanique, comprendre comment les échanges air-mer de CO2 varient d'une saison à l'autre et d'une année à l'autre, estimer l'évolution de ces échanges en réponse à des changements climatiques et identifier la composante anthropique du carbone dans l'océan. Les campagnes de mesure du programme OISO sont faites à bord du Marion Dufresne qui assure la logistique des îles australes de l’océan Indien. C’est une zone océanique qu’aucune route maritime ne traverse. Impossible donc de faire appel aux navires marchands qui, en d’autres lieux, sont souvent sollicités pour conduire des projets de mesures répétées (observations météorologiques, sondages bathythermiques, prélèvements d’échantillons, etc.). Les points de mesure s’échelonnent donc le long des routes suivies par le navire ravitailleur des TAAF, entre la Réunion et les îles Crozet, Kerguelen et Amsterdam.


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3- Profils de carbone inorganique dissous (NDIC, normalisé en salinité) et de d13C-DIC (isotope stable du DIC) observés en 1978 (campagne Geosecs en bleu) et 1998 (campagne Oiso en rouge) dans la zone subtropicale indienne. L'accroissement de DIC entre les deux séries de mesures et la diminution de d13C-DIC témoignent de la pénétration de carbone anthropique dans l'océan. Il faut noter que, malgré les incertitudes sur les mesures (actuellement de l'ordre de 1 à 2 µmol/kg), l'augmentation de CO2 dans l'océan sur 20 ans est clairement mesurable. Depuis 1978, le DIC a augmenté d'environ 30 µmol/kg en surface, tandis qu'à 1000 m la différence entre 1978 et 1998 n'est plus significative. Il est important de poursuivre ce type de mesures permettant d’estimer l'évolution du signal de CO2 anthropique dans l'océan, pour prévoir comment ce signal peut changer dans le futur sous des conditions climatiques, et donc de couplage océan-atmosphère, différentes (précipitations, vent, échanges de chaleur, activité biologique, etc...).

 

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Ainsi, le domaine océanique couvert par les campagnes de mesure OISO constitue-t-il une pièce permettant de reconstituer le puzzle planétaire de la distribution des sources et puits de CO2 océaniques. 
Le Service d'observation OISO prévoit au moins deux campagnes par an, une en été austral (janvier), l'autre en hiver austral (juillet). En complément des mesures de surface effectuées en continu de température, salinité, CO2, Chlorophylle etc..., une vingtaine de stations fixes sont réalisées sur le parcours, avec mesures sur la colonne d'eau des propriétés hydrologiques, géochimiques et biologiques (CO2, alcalinité, sels nutritifs, etc.), ce qui permet de s'intéresser aux variations temporelles et à la stabilité des couches de sub-surface. Outre l'étude détaillée du cycle du CO2 océanique dans la zone sud-ouest indienne et australe, les données recueillies lors des campagnes OISO servent aussi à initialiser et à valider les modèles océaniques du cycle du carbone et les modèles couplés climat/carbone (tel celui développé à l'IPSL), seuls outils envisageables pour apprécier les scénarios de climat futur.

L'océan Austral : puits ou source de CO2 ?

Le programme OISO porte une attention particulière à la zone australe, très peu documentée et mal simulée par les modèles planétaires du cycle de carbone océanique.Notons aussi que la plupart

Mais, elles s’étendent aussi vers le sud pour assurer un suivi saisonnier et interannuel en zone australe et pour revisiter les sites explorés durant les campagnes océanographiques américaines (Geosecs en 1978) et françaises (Kerfix, Indigo et Minerve). 

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Cette stratégie de mesures répétées dans l'océan Indien sud permet un suivi à long terme, dans une région complémentaire de celles déjà couvertes par des laboratoires étrangers en Atlantique, dans le Pacifique et dans le sud-est de l’océan Indien.

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des modèles basés sur les observations chimiques atmosphériques indiquent que l'océan Austral est une source de CO2, ce qui est en contradiction avec les observations océaniques.

Cette répartition des mesures permet de documenter des "provinces biogéochimi- ques" pour lesquelles les   variations spatio-temporelles du cycle du CO2 océanique sont différentes à la fois en amplitude et en phase. Les processus qui contrôlent ces variations sont, en effet, spécifiques à ces régions (voir figure 4) : depuis la Réunion, et en allant vers le sud, le trajet traverse la zone subtropicale, la zone frontale (qui inclut la convergence subtropicale, le front des Aiguilles, le front polaire), et l'océan Austral au sud de 50°S que l'on sépare en deux sous-systèmes dont la frontière est la limite d'extension maximale des glaces en hiver : la zone ouverte (50-57°S) et la zone saisonnière de glace.

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Oiso de 1 à 7

Le programme Oiso (Océan Indien service d'observation, labellisé Service d'observation INSU en juillet 1997) est soutenu par trois instituts (INSU, IFRTP et IPSL). Depuis le démarrage de l'opération en 1998, cinq campagnes ont été effectuées à bord du Marion-Dufresne : Oiso-1 (janvier-février 1998), Oiso-2 (août-septembre1998), Oiso-3 (décembre 1998), Oiso-4 (janvier-février 2000) et Oiso-5 (juillet-août 2000). Les campagnes Oiso-6 (janvier-février 2001) et Oiso-7 (juillet-août 2001) sont programmées. D’autres campagnes devraient suivre selon une programmation bi-annuelle.
Le Service d’observation Oiso peut accueillir des études ponctuelles. Plusieurs projets ont été associés aux campagnes Oiso-4 et Oiso-5 : intercomparaison et largage de bouées dérivantes Carioca (LODYC/IPSL) ; échantillonnage d'eau pour la mesure de pigments (Programme Geb&Co, LODYC/IPSL/IRD) ; étude génétique et morphologique des foraminifères planctoniques (collaboration avec l'Université de Genève, le Woods Hole Institute aux Etats-Unis, et l'équipe Paléo ERS Lyon1). En Janvier 2001, la campagne Oiso-6 accueillera une étude sur l'ultraphytoplancton (collaboration laboratoire COM de Marseille).
Dans un futur proche, signalons que la plateforme OISO a été selectionnée pour le largage de flotteurs autonomes dans le cadre de l'expérience internationale CLIVAR (Climate Variability), une action qui devrait avoir lieu en 2002. On peut enfin noter que l'ensemble des données OISO seront mises à profit pour les études portant sur la variabilité des écosystèmes et prédateurs marins, oiseaux, otaries, manchots (collaboration avec le laboratoire CBEC de Chizé), un témoignage de l'interdisciplinarité au CNRS entre les départements des Sciences de l'Univers et des Sciences de la Vie.


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4 - Durant l'été austral, les variations du CO2 océanique sont dominées par les processus biologiques. Sur cette carte nous avons superposé le trajet de la campagne Oiso-1 de janvier-février 1998 au champs mensuel de concentration en chlorophylle détecté par le capteur satellitaire SeaWIFS/NASA pour la même période (concentration croissante du bleu au rouge). Sur la droite de la figure, nous avons reporté en fonction de la latitude, les mesures de CO2 dans l'eau de surface (en vert) et dans l'air (en rouge) obtenues lors de la mission Oiso-1 le long du trajet ouest (Réunion-Crozet-Kerguelen-60°S). Dans les régions oligotrophes (zones bleues, 20°S-35°S et 60°S) le CO2 océanique est plus élevé que dans l'air : l'océan est une source. Dans les zones où l'activité biologique est plus intense (zones vertes, 40°S) l'océan de surface est sous-saturé et agit en qualité de puits de CO2. Dans la zone frontale (45-50°S) ; le CO2 océanique varie fortement en fonction de la production biologique.

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C'est pourquoi durant les campagnes OISO, nous échantillons également l'air dans des flacons pour la mesure des espèces chimiques (CO2, méthane, oxyde d'azote etc..), ce qui représente un échantillonage complémentaire aux stations permanentes de mesures atmosphériques à l'Ile d'Amsterdam par les équipes françaises (IPSL) ou au Pole Sud par les équipes américaines. Outre les observations chimiques et biogéochimiques sur le système du CO2 océanique, OISO fournit également des observations intéressantes sur la dynamique de l'océan, par exemple sur la variabilité de la couche de mélange océanique mesurée au cours des stations fixes: en hiver austral, des couches de mélange profondes d'environ 500 m ont été observées dans la zone sub-antarctique, là où les couches de mélange issues de climatologies ou des modèles dynamiques ne dépassent pas 200 m. Une bonne connaissance du forçage dynamique est fondamentale pour comprendre la variabilité du cycle du carbone. En effet, en hiver austral, sous l'effet du vent, qui brasse la couche superficielle de l’océan, et du refroidissement qui rend l’eau de surface plus dense et l’a fait plonger, des remontées d’eau profonde, enrichies en CO2, se produisent et viennent accroître le CO2 de surface pour atteindre des concentrations proches de l'équilibre avec l'atmosphère (voir par exemple les mesures de la campagne OISO-5 en Aout 2000, présentées figure 5). Ces eaux, également enrichies en sels nutritifs, vont, avec la disponibilité de lumière, conditionner l'activité biologique estivale qui, en retour, va diminuer les concentrations de CO2 de surface, ce qui explique les faibles concentrations de CO2 observées en été (voir figure 4). Ce n'est là qu'un exemple de l'importance du couplage des processus dynamique et biologique pour comprendre comment varient les flux de CO2 à l'interface air-mer.

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5 - Distribution latitudinale de la température (courbe verte) et du CO2 des eaux de surface (courbe bleue) mesurées en continu lors de la campagne Oiso5 entre Kerguelen et le point le plus Sud atteint durant les cinq jours de navigation (1-5 août 2000). Sont présentés les profils aller et retour. La température diminue régulièrement du nord au sud, avec deux situations frontales marquées à 56°S et 58°S; elles correspondent respectivement au croisement d'icebergs (lesquels voyagent le long de la ligne frontale, sans doute depuis la Mer de Weddell dans l'atlantique sud) et à la limite maximale d'extension des glaces. 

Sur les deux trajets, les concentrations de CO2 de l'eau de mer observées durant Oiso sont toujours proches des concentrations atmosphériques (indiqué par la ligne rouge). Le flux net de CO2 à l'interface air-mer, qui dépend des gradients de CO2 entre l'air et l'eau, est donc faible. Une information importante concerne l'homogénéité observée du pCO2 dans la zone ouverte de l'océan Austral. Ces nouvelles mesures vont permettre d'estimer avec plus de précisions les flux air-mer de CO2 dans l'océan Austral et le rôle de cet océan en tant que puits ou source de CO2. (Extrait du rapport de mission Oiso-5, N. Metzl)

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D'autres processus, comme le couplage glace-océan, les variations thermody- namiques, le pompage de carbone suivant les espèces phytoplantoniques, sont également à prendre en compte si l'on veut accorder un peu de réalisme aux analyses des changements climatiques passés, présents et futurs. Comment expliquer les variations de température et de CO2 suivant les cycles glaciaires/ interglaciaires ? L'augmentation récente de la température à l'échelle planétaire est-elle liée à l'accroissement de l'effet de serre dû à l'utilisation massive des combustibles fossiles ? Quels seraient les rôles, actif ou interactif, de la vie marine et de la dynamique de l'océan dans des climats futurs ?

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Malgré les incertitudes numériques sur les bilans nets de carbone pour les deux dernières décennies, les prédictions des modèles couplés océan-atmosphère indiquent qu'à l'horizon 2050-2100, la réponse de l'océan Austral serait particulièrement sensible à l'accroisse- ment de l'effet de serre dû aux activités anthropiques. Des changements notables sur les structures thermiques, sur la circulation océanique et sur l'activité biologique conduiraient à une répartition différente des sources et puits de CO2 océanique qu'il faut pouvoir tenter d'observer dès maintenant, en particulier pour définir des conditions initiales de bonne qualité.

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Comme on le voit, les questions ne manquent pas. Une riche moisson de données actuelles est indispensable pour quantifier le bilan global de carbone contemporain, pour comprendre les climats passés et futurs. Les campagnes OISO participent à cette collecte d’information, en complément de ce qui se fait dans d’autres océans. Mais la présence sur le terrain ne suffit pas. Pour avancer dans la compréhension, il faut aussi traiter, analyser et mettre les données à la disponibilité de tous. Cet effort d'archivage au niveau national passe aussi par une disponibilité accrue en moyens humains dans les laboratoires.


Remerciements

La réussite de ces campagnes répétées ne pourrait être accomplie sans les qualités professionnelles et humaines des équipages et ingénieurs qui partagent ces missions. Les relations privilégiées avec les collègues des TAAF sont importantes pour réussir le couplage des travaux scientifiques et logistiques sur les bases. Nous tenons à remercier les commandants Gauthier et Foubert, les équipages du Marion Dufresne et l'équipe Océano de l'IFRTP (B. Ollivier, J. Hoffmann et A. Jaouen) pour leur aide permanente au cours des campagnes Oiso réalisées depuis 1998.